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  • Elisa Azogui-Burlac

Peut-on ne pas transmettre ?

Je déteste quand je crie. J’aimerais avoir plus de contrôle sur cette facette de ma personnalité, mais rien n’y fait. Je me demande parfois si nos émotions son génétiques. Ce côté sanguin et impulsif vient de ma filiation paternelle. C’est le Maroc qui coule dans mes veines et qui me monte au cerveau d’un coup, comme ça ! Je me mets à crier, fort ! Je jette aussi des choses par terre… Et puis je vois leurs têtes, mon fils qui pleure avec sa main dans la bouche, ma fille qui me regarde ahurie. Et c’est parti pour des heures de culpabilité.“Pourquoi j’ai recommencé, je m’étais juré de ne plus le faire, en plus pour des bêtises”. J’appelle mon mari, paniquée “J’ai crié !” .



Bien sûr en tant que parents, on vit tous ces pétages de plombs, ces moments où tu hurles comme pour te libérer de la frustration d’être parent justement ! Mais moi je sais que c’est plus que ça, c’est structurel, c’est mon caractère. Je l’ai hérité de mes échanges familiaux et au fond je le transmets à mes enfants. Je ne sais pas ce qu’ils en feront, mais c’est là.


J’ai tenté de me soigner à coup d’éducation positive. L’enfer ! On aimerait tous offrir un environnement parfait à nos enfants, nettoyé de nos imperfections, projections, angoisses… Mais l’éducation positive, c’est de l'aseptisation des sentiments, voire de la détox sentimentale pour devenir un parent en mode contrôle. C’est comme avoir Marry Poppins en surmoi permanent. L’enfer je vous dis !


"Je comprends que tu sois jaloux de ta soeur, mais la taper ou me tirer les cheveux n’est pas une solution qui va t’aider à dépasser ce sentiment…" C’est Le Morceau de Sucre qui aide ….


Attention, je ne dis qu’il ne faut pas faire attention à la manière dont on parle et dont on se comporte avec nos enfants, mais il faut se détendre quand même !  Ce n’est pas du tout rassurant l’éducation positive. Tu as l’impression qu’à chaque débordement, tu vas gâcher de manière irréversible la vie de ta progéniture.


“Je lui ai fait peur en jetant son doudou dans la poubelle ! C’est foutu je te dis, il ne pourra plus aimer et sera insécurisé toute sa vie !”


En même temps, je comprends pourquoi ça marche. Combien de discussions j’ai eu avec d’autres parents sur comment créer un foyer sans tension. Comment ne pas transmettre ces parties de nous que l’on aime moins et ne donner que le meilleur à nos enfants. Pour le meilleur et pour le meilleur...on garde le pire pour nos partenaires :


Dans la famille Parents, je voudrais un père,  mais pas hypocondriaque s’il vous plaît ! Tu en connais toi ? Et une mère, superwoman qui gère tout bien. Tiens, ça j’en connais ! (Allez, c’est ma minute Girl Power et charge mentale juste pour se faire du bien.)


Être des parents parfaits pour avoir des enfants parfaits. Si je crois moyen à cette formule, je pense surtout qu’il est impossible de ne pas transmettre. En effet, si je tente de prendre le dessus sur une de mes angoisses, est-ce que je n’inscris pas pour autant cette angoisse dans notre environnement, dans nos non dits ou nos dits justement ?


C’est une drôle de chose que la transmission parce que précisément, ça nous échappe. Si cela fait partie de nous, ça ne nous appartient pas vraiment pour autant. C’est comme des lapsus du quotidien et de la vie, la transmission.


Je me souviens la première fois que j’ai réalisé que je reproduisais les gestes de ma mère. C’était lors des premières maladies de mon fils, encore bébé. Je me suis vue faire les mêmes caresses, chanter les mêmes chansons, donner les mêmes baisers. Je n’allais pas pas uniquement apprendre à être mère, j’allais aussi reproduire l’éducation que j’avais reçue.


Ce qui, dans mon cas, m’a plutôt rassurée ! Si il y a quelque chose qu’on arrive bien à transmettre avec mon mari, de génération en génération, de coeur en coeur, c’est l’affection. Alors quand je culpabilise trop d’avoir crié, je me dis que tout cet amour ça colmatera bien les petites plaies laissées par  nos impulsions, nos angoisses, nos lapsus...


Mais je me jure quand même qu’on ne m’y prendra plus !

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